vendredi 16 avril 2010

Petit déjeuner à Istanbul - et festival du film

Comme des milliers d'autres visiteurs, je suis à Istanbul pour le Festival du Film, organisé par l'Istanbul Foundation for Culture and Arts et dirigé par Azize Tan. En parallèle, de nombreux évènements, dont une joute verbale entre Ali Kazma et Mario Rizzi - deux artistes que l'on a vus et verra encore à Genève - une joute sur le thème - pourquoi la vidéo d'art ? pourquoi le film d'artiste ? quelle place laissée au spectateur, quelle mission ? - et pourquoi avant tout, l'image mouvante ? Quelques réponses suggérées par ce débat, dont la modératrice, Aysegül Sönmez, journaliste et féministe renommée, vient de publier, en turc et en anglais, une passionnante série d’interviews de femmes, Unjust Provocation. Parce que celle-ci, mieux que toute autre, représente notre temps. Parce que l'image mouvante - vidéo ou film d’artiste - inclut tout, l'histoire, la musique, la littérature, la philosophie, le plaisir, l'image, le mouvement... et conjugue l’ensemble de ces aspects, tout en requérant du spectateur un temps déterminé d’attention visuelle.

Istanbul elle aussi requiert l’attention de ses visiteurs. D’un dynamisme oublié ailleurs : ici tout est en mouvement, tout semble possible, rien n’est figé, il est mille interstices urbains et créatifs où s’infiltrer, l’histoire na pas de fin mais est en train de s’écrire. Istanbul, 15 millions d'habitants et presque autant de chats : une immense image mouvante, comme les flots humains qui la traversent, comme une vidéo qui défile sous nos yeux, un lieu de passage géographique, historique et politique, une culture bouillonnante de créativité, dont témoignent les centres d’art, festivals, biennales, maisons d’éditions, et ces rendez-vous constants, le plus souvent spontanés, entre acteurs pluriels de cette vie culturelle débordante.

Et tout ce monde mange aussi, et très bien ! Dans la rue, jus d’orange pressé frais et marrons grillés. Ou et en attendant, comme tant d'autres passagers, le prochain ferry pour l'Asie, entrer au Namli Gurme. Le self-service le plus exubérant, odorant, haut en couleurs, chaotique et efficace que l’on puisse imaginer... Selon Kutlug Ataman, l'artiste star d'Istanbul - vidéaste et cinéaste - les meilleures olives de la ville. Mais pas seulement : une centaine de variétés de fromages, aubergines, concombres, tomates, poivrons, oignons frais, viandes de mille sortes, tout donne envie, tout est frais, depuis 1929... Pour le café, il est recommandé de passer juste à côté, au Güllüoglu, un autre style - tout est blanc et marron, là, calme et sirupeux, depuis 1871, comme les indispensables sucreries poisseuses et le baklava, servies avec ce café turc qui vous reste crissant entre les dents pour l’heure qui suit... Jusqu’au prochain café turc, donc. Une fois bu et la tasse renversée, Aysegül Sönmez vous prédit l’avenir avec une assurance sans faille. Il paraît que je vais revenir à Istanbul bientôt. Elle a certainement raison...



Publié le 16 avril 2010, dans les Quotidiennes

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