On a beaucoup entendu parler du Centre Culturel Suisse à Paris ces dernières semaines avec la nomination de ses nouveaux directeurs, Jean-Paul Felley & Olivier Kaeser. Mais en attendant leur arrivée en octobre prochain, le Centre donne le meilleur de lui-même. Nicolas Trembley a ainsi organisé une exposition d’art global qui fait appel à tous nos sens. Le Centre qui avait accueilli l’exposition délirante de Hirschhorn toute faite de carton et de papier mâché est maintenant transformé en appartement néo-bourgeois (ou post-furniture, puisque l’on est désormais soit néo soit post ou alors rien) dans lequel l’atmosphère Jacques Garcia (genre salons de thé Ladurée) envahit les décors dans lesquels John Armleder a grandi : l’Hôtel Richemond à Genève. Qui de nous ne se souvient pas avec la plus conceptuelle des nostalgies de l’époque dorée où Sylvie Fleury et lui habitaient à l’hôtel, et où les amis venaient boire du champagne dans un décor désormais digne du Centre Culturel Suisse de Paris ?
Musique, photos d’Helmut Newton et Nobuyoshi Araki (un minimum de sexe est indispensable pour affirmer que tout n’est pas fini), lumière d’ambiance, lys penchés sur leur propre parfum dans d’immenses vases, sièges moelleux, et même… une toile scintillante de John Armleder au-dessus de la cheminée. Fusion entre le concept et le décor, entre la référence et l’ironie, entre « la pièce » (l’œuvre d’art avec laquelle on vit) et « la pièce » (dans laquelle on vit), entre le style et le goût (dont nul n’osera dire s’il est bon ou mauvais), l’exposition Armleder – Garcia est aussi la fusion entre deux histoires : celle de Garcia – l’Hôtel Costes – et celle d’Armleder – l’hôtel Richemond. On a entendu dire que les deux hommes, qui ne se connaissaient pas avant cette aventure, avaient tous deux une peau de tigre dont ils ont chacun coupé la tête pour l’exposer séparément. Un signe du destin, sans aucun doute.
Une exposition à voir absolument donc – et aussi, à lire. Nicolas Trembley nous a préparé une bibliographie remarquable sur la question du décoratif – s’il ne fallait choisir qu’un seul ouvrage – ce que bien sûr il ne faut pas – ce serait alors, la Psychologie du Kitsch, de Abraham Moles (Denoël 1977). Dans un schéma dessiné par l’auteur, supposé « matérialiser la cohérence profonde de champs d’intérêt apparemment disparates mais qui en réalité se recoupent » (Jean Devèze, Hermès 39, 2005), le kitsch se trouve au centre. Au centre des Labyrinthes du vécu (selon le titre d’un autre ouvrage de Moles). Ou encore, le kitsch conceptualisé.
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