Pier Luigi Celli, ancien directeur général de la RAI et aujourd'hui directeur de la Libera Università internazionale degli studi sociali, a publié dans la Republica.it, fin 2009, une lettre ouverte à son fils, à propos de son pays, l'Italie. Il confesse en substance : “nous aurions aimé faire quelque chose de ce pays mais nous avons failli.” Et voici ses recommandations : “Quitte l'Italie ! Choisis d'aller la où la légalité, le respect, la reconnaissance du mérite et des résultats, sont encore des valeurs qui comptent. Et prépare-toi quoiqu'il en soit à souffrir”, écrit encore le père. Quand on connaît les Italiens, on peut imaginer ce que lui-même a enduré, comme souffrance narcissique, avant d'en arriver à publier ce message : mon fils, quitte ton pays, il n'en vaut pas la peine. Ce pays n'est plus le tien.
Un autre père désespéré : celui du jeune Nigérian Umar Farouk Abdulmutallab, le responsable de l'attentat manqué de Detroit. Umar Farouk, âgé de 23 ans, séjourne au Yémen après avoir obtenu un visa pour étudier la langue arabe. Lors de son séjour, il semble se laisser entraîner dans le réseau d'Oussama Ben Laden. Son père essaie de le retenir, mais sans succès. Il décide alors d’avertir la CIA elle-même de la radicalisation des positions personnelles et politiques de son fils, et se rend pour ce faire à l'ambassade américaine d'Abuja, la capitale du Nigeria, le 19 novembre 2009. Quand on connaît un peu les pères, on ose à peine imaginer ce que ce père-là a enduré, comme arrachement, pour en arriver à dénoncer son propre fils.
A propos de ce deuxième père, l’International Herald Tribune titrait : Fathers are always right. Les pères peut-être; le désespoir non.
Le désespoir du premier n’est que paravent pour se dissimuler à soi-même la blessure narcissique de l’échec de ses propres valeurs. Le désespoir du second est aveu d’échec, là aussi, cruel échec de ne pas avoir su retenir le fils dans le creuset des valeurs familiales.
Ces deux histoires aux dimensions fort différentes nous posent en fait la même question, celle de la transmission des valeurs, de père en fils. Une question d’une grande actualité. Comment faire, en ces temps de crises et de bouleversements, pour transmettre à nos enfants les valeurs qui nous sont chères et que nous pensons justes ? Je ne vois que deux pistes, qui excluent le désespoir : l’écoute, et l’exemple. Dans l’écoute et dans l’exemple, oui, je veux bien croire alors que Fathers are always right. S’il se mettait soudain à écouter, même Nicolas Sarkozy...
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