Michel Ritter est mort avant d'avoir pu donner tout ce qu'il pouvait donner, surtout face à cette Suisse si frileuse en art contemporain. Heureusement, l'Office fédéral de la culture lui a tout de même décerné en 2005 le Prix Meret Oppenheim, prix dont il distribua la somme entre trois lieux d'exposition alternatifs. Mais à peine est-il disparu que l'Union pour la démission culturelle (UDC) hurle: nous avons perdu contre Ritter vivant, mais nous gagnerons contre Ritter mort! Et le conseiller national Freysinger de proposer de fermer le Centre culturel suisse à Paris. C'est vrai, en quoi peut-il servir un pays qui se refuse à l'ouverture sur l'Europe? Heureusement, Mario Annoni, le président de Pro Helvetia, semble veiller au grain: «Nous voulons que la culture suisse soit présente partout dans le monde... et le Centre de Paris ou celui de Rome restent des phares essentiels dans les relations avec nos voisins. Nous avons la ferme volonté de maintenir le Centre Poussepin. Il est devenu un des passages obligés de la vie culturelle parisienne. Michel Ritter a su l'ancrer dans la création contemporaine.»
Après tous les soutiens reçus de son vivant - à Genève notamment de Véronique Bacchetta - Michel Ritter mort a celui d'un de nos plus grands artistes, Thomas Hirschhorn, publié dans Le Temps [...]. Il explique que Ritter savait non seulement aimer le travail d'un artiste, mais se décider pour le travail d'un artiste: «En tant qu'artiste, je peux mesurer la différence entre choisir un travail - ce qui est déjà très beau - et prendre la décision pour un travail - ce qui est exceptionnel.»
L'amour de l'art, dit encore Hirschhorn, procède du désir et de la passion. Et selon Deleuze, faire de l'art, c'est faire acte de résistance contre la mort. Pour résister contre celle de Michel Ritter, nous avons dès aujourd'hui à nous décider pour l'art, et à faire acte de création, et non de destruction, au Centre culturel suisse à Paris. Pour que Michel Ritter gagne, mort comme vivant, contre les fossoyeurs de la culture.
Publié dans Le Temps, 5 juin 2007
dimanche 1 juillet 2007
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