L’architecture en effet est à l’honneur en ce moment, en France et ailleurs, de Lézigno à Valenciennes, de Gênes à Genève, de Londres à Biarritz, à la croisée des chemins entre art et politique, entre qualité maximale et désastres environnementaux, entre rêves et réflexions, rires et émotions - tout cela pendant que l’architecture suisse, elle, s’exporte sans complexe, à Pékin et Calcutta, archi-local et archi-global.
Archipolitique n’est pas toujours archi-crime. Il ne s’agit pas seulement de détruire en banlieue parisienne certains désastres architecturaux et sociaux comme ceux de Sarcelles - non, la France construit aussi des liens, des réseaux, riches et productifs, entre politiciens, artistes, intellectuels et entrepreneurs. «Heureuses Coïncidences», le Colloque de Lézigno, organisé par Luciana Ravanel (lien Quotidiennes Ravanel), en collaboration avec Paul Ardenne, spécialiste de l’art en espace public, draine chaque année vers le sud non moins de deux cents participants et génère les interactions les plus éclectiques et les plus riches.
Tout ceci et grâce à la volonté, à l’intelligence et au soutien financier et logistique d’Agnès Jullian, jeune femme hors du commun qui a repris du jour au lendemain la direction de l’entreprise familiale Technilum, spécialisée dans l’éclairage public, et en a fait non seulement une entreprise florissante, mais une entreprise engagée - heureuse coïncidence s’il en est entre entreprise familiale et mécénat culturel!
Au colloque de Lézigno, cette année, on n’aura pas seulement entendu les plus grands architectes – même Kengo Kuma était là, le prince japonais de l’architecture organique – mais aussi, de manière plus inattendue, quelqu’un comme Laurent Fachard (Eclairagistes Associés) qui s’attache notamment à illuminer les prisons (l’esthétique lumineuse de la prison comme facteur de réhabilitation) – ou encore le maire de Valenciennes.
Mais pourquoi donc, le maire de Valenciennes? Parce que Dominique Riquet a fait le pari périlleux que la culture pouvait devenir un véritable instrument de réhabilitation de sa région déclarée sinistrée (26% de chômage en moyenne). Et pour symboliser la réussite apparente de son approche, le maire a confié à Jean-Bernard Métais, artiste, la résurrection du beffroi de sa ville après que le projet de l’artiste a été plébiscité par la population comme par les politiques.
Pourquoi le beffroi? Parce que ce clocher, depuis le 11ème siècle, marque l’autonomie et la puissance des communes libres. Comme une flèche de lumière et de murmures qui s’élève désormais sur la place en direction de l’avenir, le beffroi résonne des mots des 7000 personnes qui ont participé au projet et apporté leurs réponses à des questions comme «Qu’est-ce que c’est que Valenciennes»? «Que représente le Nord»? «Quel a été votre premier sentiment de liberté»? Le beffroi de Valenciennes est devenu cette rumeur sensible de la ville, une liberté partagée, qui appartient à chacun.
Une telle architecture poétique pourrait-elle faire revivre par exemple les terres détruites de Sarcelles? Peut-être faudrait-il y inviter de toute urgence le maire Riquet?
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