Après le pique-nique paneuropéen du 19 août 1989, près de Sopron, au cours duquel plus de 10.000 personnes auront fêté l’ouverture du rideau de fer et la déferlante de la liberté, le 12 octobre, la frontière austro-hongroise s’ouvrait définitivement, à Hegyeshlaom. On raconte que dès ce jour là, de longues files de Trabant passaient d’un côté à l’autre de ce lieu alors mythique, avec des frigos hissés sur les toits des petites voitures au design de Bauhaus…
L’ouverture des frontières signait la liberté, le frigo l’accès à l’occident, et Hegeyshalom passait du lieu du contrôle absolu à celui de la célébration.
Vingt ans plus tard, Hegeyshalom apparaît non plus comme symbole d’ouverture mais comme symbole de la déréliction. Le lieu est abandonné à lui-même et d’une grande saleté : il semble bien que plus personne ici ne vide les poubelles ni ne déplace les voitures à l’abandon.
Au-dessus de l’horizon, les éoliennes tournent en silence, et l’élégance de la danse de ces ballerines qui de loin semble s’enlacer, s’embrasser, s’entrelacer, ne fait que rajouter à la désolation du lieu. La question qui se pose ici, comme dans d’autres régions de ces pays de l’est à l’honneur aujourd’hui, n’est plus tant celle de la liberté que celle du développement. Du développement individuel comme du développement économique. Les deux semblent ici plus que jamais liés.
Faute de prendre à bras le corps leur propre développement et de le laisser entre les mains des pays occidentaux - avec l’Allemagne aux premières loges, notamment pour les éoliennes – on peut craindre que l’aliénation économique remplace progressivement l’aliénation politique qui prit fin, il y a vingt ans environ. Mais la liberté ne se gagne pas en silence, le développement autonome non plus !
Publié dans les Quotidiennes, le 13 octobre 2009
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